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AVIS C Cass N°15010 DU 12 JUILLET 2018 - L’ABSENCE DE NOTIFICATION DE LA DECLARATION D’APPEL A L’AVOCAT NOUVELLEMENT CONSTITUE N’ENTRAINE PAS CADUCITE DE LA DECLARATION D’APPEL

Le 26 juillet 2018
AVIS C Cass N°15010 DU 12 JUILLET 2018 - L’ABSENCE DE NOTIFICATION DE LA DECLARATION D’APPEL A L’AVOCAT NOUVELLEMENT CONSTITUE N’ENTRAINE PAS CADUCITE DE LA DECLARATION D’APPEL

La question était posée depuis plusieurs mois pour les praticiens de la Procédure d’Appel, et plus précisément depuis la réforme opérée par le décret n°2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile.

Ce décret a, entre autres choses, modifié les dispositions applicables à la notification de la déclaration d’appel à la partie n’ayant pas constitué Avocat dans le mois de l’avis donné par le greffe, à la fois dans le cadre de la procédure ordinaire et dans celui de la procédure à bref délais prévue aux articles 905 et suivants du Code de Procédure Civile.

 

La situation antérieure

Précédemment, l’article 902 du Code de Procédure Civile disposait qu’ « en cas de retour au greffe de la lettre de notification ou lorsque l'intimé n'a pas constitué avocat dans un délai d'un mois à compter de l'envoi de la lettre de notification, le greffier en avise l'avocat de l'appelant afin que celui-ci procède par voie de signification de la déclaration d'appel.

A peine de caducité de la déclaration d'appel, la signification doit être effectuée dans le mois de l'avis adressé par le greffe ».

(Article 902 ancien)

 Il n’était ainsi rien prévu pour les cas où un Avocat se constituait dans le délai d’un mois prévu pour la signification de la déclaration d’appel, à la différence de ce qui était prévu par l’article 911 du Code pour ce qui est des Conclusions :

 « Sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées dans le mois suivant l'expiration de ce délai aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat » (article 911 ancien).

 Ainsi, si les parties n’ayant pas constitué Avocat finissaient par le faire dans le délai d’un mois, et que les Conclusions de l’Appelant (ou de l’un des intimés), ne lui avaient pas encore été signifiées par voie d’Huissier, il était procédé par voie de notification à leur Avocat, et ce à peine de caducité de la déclaration d’appel, tel que prévu par le début de l’article (la sanction prévue aux articles 908 à 910 est la caducité de la déclaration d’appel), et tel que tranché de façon régulière par la Deuxième Chambre Civile de la Cour de Cassation (Civ, 2ème, 10 avril 2014, n°12-29.333 ; Civ, 2ème, 4 septembre 2014, n°13-22.586 ; Civ, 2ème, 25 juin 2015, n°14-21.853 ; Civ, 2ème, 21 janvier 2016, n°14-28.985).

La modification opérée par le décret du 6 mai 2017

Or, le décret du 6 mai 2017 précité a complété le troisième alinéa de l’article 902 du Code de la manière suivante : « A peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office, la signification doit être effectuée dans le mois de l'avis adressé par le greffe ; cependant, si, entre-temps, l'intimé a constitué avocat avant la signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat ».

 Dans le même temps, il créée un article 905-1, applicable aux procédures d’appel « urgentes », qui dispose en son premier alinéa que : « Lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l'intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat ».

 Soit pour ces deux articles une formulation similaire à celle de l’article 911, qui n’avait pas manqué de provoquer l’émoi de la profession, laquelle considérait cette obligation de notifier la déclaration d’appel à l’Avocat nouvellement constitué quelque peu surabondante, sa Constitution impliquant par elle-même qu’il avait connaissance de la déclaration d’appel.

Assortir cette obligation de la sanction radicale de caducité de la déclaration d’appel semblait encore plus préoccupant…

Néanmoins, il apparaissait parfaitement logique au premier abord d’assortir le non-respect de cette obligation de la même sanction que dans le cadre de l’article 911, la formulation des articles étant identique.

 

La position de la Cour de Cassation

Applicable depuis le mois de septembre 2017, il aura fallu attendre le mois de juillet 2018 pour que soit sollicité l’Avis de la Cour de Cassation, et que soit rendu l’avis n°15010 du 12 juillet 2018.

Dans cette affaire, après dépôt de la déclaration d’appel, une Ordonnance de fixation à bref délai avait été rendue le 15 février 2018, en application de l’article 905 du Code de Procédure Civile.

L’appelant avait donc dix jours à compter de cette date pour signifier sa déclaration d’appel à la partie non constituée, ou pour la notifier à son Avocat nouvellement constitué, soit jusqu’au 26 février 2018 à 23h59, le 25 février étant un dimanche.

L’intimée a constitué Avocat le 16 février.

La déclaration d’appel a été dénoncée à l’Avocat de l’intimée le 1er mars, soit après le délai de 10 jours.

Un incident a été introduit par l’intimée devant Madame le Président de la Chambre Economique de la Cour d’Appel d’AMIENS, aux fins de voir constater la caducité de la déclaration d’appel. 

Devant la question de droit qui lui était posée, la Présidente a requis l’Avis de la Cour de Cassation, laquelle a considéré qu’ « en application de l’article 905-1, alinéa 1, du Code de Procédure Civile, l’obligation faite à l’appelant de notifier la déclaration d’appel à l’Avocat que l’intimé à préalablement constitué, dans le délai de 10 jours de la réception de l’avis de fixation adressé par le Greffe, n’est pas prescrite à peine de caducité de cette déclaration d’appel ».

 

Cet avis est à la fois troublant et bienveillant :

 

- Troublant en ce qu’il opère une différence de sanction injustifiée entre la notification des Conclusions (article 911) et celle de la déclaration d’appel, alors que les articles sont pareillement rédigés, ce qui aurait dû amener une interprétation identique de la part de la Haute Cour.

 

- Bienveillant, en ce qu’il est parfaitement aberrant de requérir de l’Avocat de l’Appelant une diligence parfaitement inutile à la procédure et aux droits de la défense, puisque si un Avocat s’est constitué au soutien des intérêts de l’intimé, c’est qu’il avait connaissance de la déclaration d’appel, de sorte qu’il est superfétatoire de la lui notifier de nouveau.

  

Dans les deux cas, la situation a désormais le mérite d’être posée.

 

Antoine CANAL

  

Voir l’Avis sur : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/avis_15/avis_classes_date_239/2018_8608/12_juillet_2018_1870008_8890/15010_12_39837.html